Vendredi j'ai passé la journée en vadrouille, à réaliser des reportages radio pour ma chronique d'été, chronique tourisme en Côte d'or pour France Bleu Bourgogne. Je suis donc allée promener mon micro en pays de Beaune, avec bien sûr la visite des Hospices de Beaune, en attendant d'y retourner pour la vente des vins en novembre, du centre historique, mais aussi du Spa en Bourgogne de Nathalie Molinier. Belle et riche journée! Je suis restée à la radio jusqu'à 22h pour charger les rush sur mon ordinateur, mais l'équipée valait la chandelle!

En fin de journée, au moment de rentrer, j'aperçois un panneau: "Abbaye de Cîteaux - 8 km". C'est trop bête pensai-je, de passer à côté sans y aller. J'oblique donc par le chemin des écoliers.

J'arrive, la cloche tinte:

les vêpres vont commencer. La musicienne en moi est ravie, quel coup de chance, j'arrive juste à temps pour écouter les moines chanter. L'Esprit devait guider mes pas, car c'étaient les vêpres solennelles de la saint Bernard, l'un des personnages les plus importants de l'ordre de Cîteaux! pour cette communauté fondée par Robert de Molesmes en 1098, c'est l'un des événements les plus importants de l'année. Alors comme j'avais mon matériel d'enregistrement avec moi, j'ai posé le micro sur le banc et j'ai enregistré l'intégralité des vêpres, pour partager ce moment magique avec les gens que j'aime.

J'ai été très étonnée de constater à quel point le chant des moines est moderne! est-ce qu'on peut appeler ça du grégorien? Bonne question. Quand on regarde dans le temps, il y eut le chant ambrosien, puis un certain nombres de "codificateurs" qui ont voulu noter la pratique orale, Guido d'Arezzo, ou le pape Grégoire le grand qui a donné son nom au chant "grégorien", et qui n'a fait que codifier sa pratique. Puis tout au long des siècles on a continué d'enrichir le répertoire: quand on s'intéresse à la question, on peut dire de certains chants grégoriens qu'ils sont "tellement XVIIIe!" ou "tellement XIXe"! Et je ne parle pas de la messe de Dumont... il y a une logique dans l'histoire: pourquoi cesserions-nous d'enrichir à notre tour la tradition?

Je ne sais pas qui est l'instigateur de cette liturgie moderne et en français à laquelle j'ai participé vendredi; mais j'ai été conquise et je pense que c'est notre rôle comme musiciens de continuer d'alimenter la tradition. Merci aux anges gardiens qui m'ont guidée vers l'abbaye de Cîteaux!

Bernard de Clairvaux est un personnage étonnant. A la fois il a prêché une croisade, et à la fois il est l'auteur des "Sermons sur le Cantique des cantiques", poème d'amour charnel et spirituel de la Bible. C'est cet aspect de St Bernard que je veux retenir. Je préfère l'amour à la guerre; cela semble un lieu commun de le dire, mais l'actualité nous montre que même de nos jours c'est loin d'être évident...