Claude Nadeau, musique classique - clavecin, orgue... musique baroque

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mardi 10 octobre 2017

Une organiste qui joue pour des obsèques...

Je reviens de jouer aux obsèques de l'épouse d'un ami sonneur de bombarde. C'est lors de ces moments que je me sens le plus utile, que ça sonne le plus juste, que je me sens vraiment à ma place : j'ai reçu la musique pour la redonner, et ce don je le mets à la disposition de mes semblables pour rythmer les grands passages de leurs vies : naissances, unions, et le grand saut vers l'inconnu, l'éternité peut-être, à moins qu'elle ne soit déjà commencée. Dans ces moments, on sait ce qu'on fait, et pourquoi on est là. A aucun autre moment je ne me sens plus légitime.

Et pourtant, tant d'obsèques se déroulent sans musique! (NB amis organistes québécois : en France, l'orgue n'est pas "inclus" à l'église, il faut se débrouiller et venir avec son propre organiste, et comme la plupart des gens ne connaissent pas d'organiste... Paris, Lyon et la plupart des cathédrales faisant toutefois exception, mais c'est minoritaire au regard de la majorité des paroisses) La plupart des obsèques se déroulent donc sans musique, avec un brave chantre qui fait son possible ou un célébrant qui chante seul, ou pire encore avec un CD. Pourtant il existe des musiciens liturgiques, formés, compétents, disponibles. Mais les freins sont clairs: ce n'est pas qu'il n'y a pas d'organistes. Il y en a. C'est d'une part qu'il faut accepter que c'est un travail, et comme le dit la Bible, "tout travail mérite salaire"; ensuite, il serait bon de réfléchir à fédérer les musiciens qualifiés et disponibles (on s'appuie pour le moment sur les réseaux personnels, untel qui connaît untel, il n'existe aucun listing), et enfin (surtout?) il faut remettre au coeur de l'Eglise les textes qui affirment la place de l'orgue dans la liturgie. Pas le djembé, pas la guitare, pas le cd. L'orgue, comme premier instrument liturgique. Je ne l'invente pas, je ne prêche pas pour ma paroisse, c'est dans les textes.

Il y a du boulot! là où j'ai joué aujourd'hui (pas ma paroisse), j'ai été accueillie par le curé qui s'est empressé de me dire que l'orgue n'était "que" l'un des éléments, facultatifs, de la liturgie (se réfugiant derrière l'argument: oui mais c'est le Christ le plus important... et fin de la discussion...) Quand j'entends cela, je suis triste, et je me demande : oui mais nous qui avons reçu ce don, puis qui nous sommes formés, pendant 10 ans, 20 ans, en musique, en liturgie, en théologie même parfois, on fait quoi maintenant?

Enfin bon, entre dans la Lumière, chère M...; quant à moi j'éprouve de la gratitude d'avoir pu accompagner ces obsèques avec trois des meilleurs sonneurs de Bretagne, qui ont, eux aussi, donné une musique priante, intense, belle, pleinement à sa place dans cette liturgie. Dans le dernier verset d'Ar Baradoz, avec l'orgue en tutti et les bombardes qui chacune improvisait une 2e voix, je n'étais pas la seule à avoir les larmes aux yeux. Ce n'est pas au Stade de France, ce n'est pas au Quartz, ni au Moustoir que ce genre de moment a lieu. C'était dans une humble église de Bretagne, aujourd'hui.

Pardon de Saint Cornély à Carnac

Le 10 septembre 2017 s'est tenu à Carnac le Pardon de la St Cornély!

Patron de la paroisse de Carnac, saint Cornély est le plus connu des saints bretons protecteurs du bétail, et notamment des bêtes à cornes. C’est pourquoi tous les ans lors du pardon, les éleveurs amènent leurs animaux pour les faire bénir, et profiter en famille de tout ce qui caractérise nos pardons de Bretagne : procession avec les bannières, musique, et convivialité.

La journée a débuté à 11h par la messe solennelle en l’église Saint Cornély, avec chants, cantiques en breton, bombarde et orgue, et s'est poursuivie sur le parvis avec sonneurs, danse, et apéro. Puis, à 15h, a débuté la procession, suivie de la bénédiction des bêtes.

Evel just hor yezh en deus bet e blas b’ar gouel, hag hon eus c’hoant bras da « advrezhonekaat » ar Pardon-mañ en ur implijout tud ha bugale ar vro!
Bien sûr, le breton a eua toute sa place dans la fête, et nous souhaitons impliquer tout particulièrement les bretonnants, grands et petits, dans les prochaines éditions du pardon!

N’eus ket deus ur plantenn hep roudou, ha n’eus ket deus Breizh hep e sevenadur. Deomp-ni da c’hoari bremañ evit kenderc’hel gant an hengoun vev : kontañ a reomp warnoc’h -hag o chatal!- evit lidañ Sant Korneli war an ton bras e devezh ar Pardon !
Il n’y a pas de plantes sans racines, et pas de Bretagne sans sa culture. A nous de jouer pour garder vivante la tradition : nous comptons sur vous -et sur vos animaux!- pour célébrer Saint Cornely avec une belle fête pour le pardon dans les années à venir!

Lire aussi le compte-rendu de Yves Daniel sur le blog Ar Gedour
Merci à Hervé Cudennec pour sa très belle vidéo et pour son chant en breton lors de la cérémonie!

lundi 20 août 2012

Litanies en grégorien

J'ai reçu un @ de quelqu'un qui me demandait la partition des litanies en latin... J'ai pensé que la réponse que je lui ai faite pourrait rendre service à quelques personnes, intéressées par cette très belle musique! Dans ma réponse, je donne les partitions, et des indications sur comment les chanter. Et j'ajoute un commentaire personnel:

Oui c'est long. C'est le principe des litanies. Mais donc, c'est la longueur de cette prière qui en fait l'intérêt. Dans d'autres traditions, on parlerait de "mantra" ou de "transe", eh bien les litanies c'est cela. Si ce n'est pas long et répétitif, cela n'a aucun intérêt. C'est aussi pour cela que le chant grégorien a des vertus (scientifiquement avérées!) apaisantes, intériorisantes. En même temps, quand on se penche sur son histoire le grégorien au tout début (qui ne s'appelait pas encore grégorien...) découle de la langue parlée, donc dans un thème comme celui-là, la phrase ne doit pas être trop lente, et doit reproduire le rythme de la parole normale, posée, mais pas lente pour autant. On ne devrait pas avoir besoin de reprendre son souffle au milieu d'une phrase. Mais bon, vous avez sans doute l'habitude de chanter le grégorien...

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lundi 29 octobre 2007

Centre de musique sacrée de Saint Anne d'Auray : chapeau

J'ai assisté samedi soir au concert "Hommage à Jean Langlais" proposé par les Choeurs de la maîtrise de Sainte-Anne d'Auray à la Basilique du même nom dans le Morbihan : une splendeur!

Des oeuvres pour choeur et orgue de Poulenc, Pierre Villette, Jean Langlais bien sûr, mais également la "Séquence de Saint Michel" de Richard Quesnel, qui dirigeait la Maîtrise. Je découvre avec bonheur ce jeune compositeur et chef (né en 77), à la direction souple et confiante, qui arrive à tirer le meilleur des jeunes voix qui lui sont confiées. Sa "Séquence", créée il y a quatre ans, est une merveille et franchement, le concert fut exceptionnel. Ils sont jeunes, ils sont talentueux, ils sont beaux, transfigurés par la musique qu'ils partagent : ces musiciens vous donnent un profond bonheur à les entendre!

Le Centre de musique sacrée de Ste Anne d'Auray, sous la houlette de Bruno Belliot, est très actif, et organise notamment tous les ans une académie d'orgue.

lundi 30 juillet 2007

Supplique à Mgr Centène, évêque de Vannes, au sujet des cantiques bretons

Monseigneur,

Le 15 août prochain, j'aurai le bonheur de m'unir à votre prière pour la messe du pardon de Notre-Dame d'Arvor, puisque la Mairie de Vannes m'a fait l'honneur de me solliciter, cette année encore, pour faire partie du jury qui élira la "Reine d'Arvor" 2007.

L'année dernière j'avais déjà eu la joie de prier avec le Père Maurey et les centaines de fidèles rassemblés à cette occasion. Je ne suis pas d'origine bretonne, mais dans ma famille originaire du Québec je suis la 7e génération de musiciens d'église. Organiste, je m'intéresse de très près à la musique bretonne, qu'elle soit classique ou traditionnelle. J'ai eu l'occasion de faire un concert bombarde, orgue et chant en 2005 à la cathédrale de Vannes, au cours duquel j'ai fait la connaissance du Père Maurey (et bien sûr également de Michel Jégo). Plus récemment, j'ai effectué une tournée au Japon à l'occasion de la St Patrick 2007, avec le soutien du Conseil Régional, de l'Ambassade de France et d'Air France, au cours de laquelle j'ai fait un concert d'orgue à Tokyo qui a permis au public japonais de découvrir les compositeurs bretons et même vannetais tout aussi bien que les cantiques traditionnels bretons.

Je vous écris spécialement pour vous dire que j'avais été profondément attristée l'année dernière par la quasi absence de cantiques bretons au cours de la messe du 15 août.

Mon regard n'est pas celui d'une militante obtuse, et ces cantiques n'évoquent chez-moi ni l'enfance ni un certain folklorisme : ils sont seulement sublimement beaux.

Plus encore, j'ai remarqué à chaque fois que je participais à une messe en basse-Bretagne, que si les fidèles ânonnent les chants en français (qui sont souvent, avouons-le, d'une qualité musicale très discutable!), dès qu'on entonne un cantique breton, c'est toute l'assemblée qui chante à gorge déployée et avec une profonde joie - enfin, pour peu qu'on ait les paroles dans le feuillet de participation !

Je sais tout l'attachement que vous portez à la culture bretonne. Vous avez sur elle un regard qui est d'autant plus sincère que, comme pour moi, ce n'est pas la culture dans laquelle vous avez grandi. Je sais aussi à quel point vous êtes sensible à la belle liturgie, si importante pour que la prière sourde au coeur des fidèles. C'est la raison pour laquelle je me tourne vers vous pour vous demander d'essayer d'influencer les différents intervenants de la messe du 15 août prochain afin qu'il y ait un peu plus de place pour les cantiques bretons. Par ces cantiques, on détient en Bretagne un trésor musical inestimable ; or si on ne les chante pas en Bretagne, où les chantera-t-on? Laissera-t-on mourir ce répertoire qui vaut bien Mozart ou Bach à mes yeux ?

Bien sûr, nombreuses sont les personnes capables, à Vannes, de proposer à l'assemblée des cantiques bretons au cours de la messe du pardon de Notre-Dame d'Arvor. Mais s'il advenait que l'absence de ce répertoire à cette messe spécifiquement soit liée à un conflit de personnes ou toute autre raison non-musicale, je me propose à vous dans un esprit de service si je pouvais me rendre utile, comme animatrice de chant, pour faire profiter de ce répertoire la nombreuse assemblée du 15 aoît, (au moins chanter Rouanez karet an Arvor, "reine aimée de l'Arvor", c'est un minimum vu la circonstance!) .

Je vous remercie d'avance de l'attention que vous porterez à ma demande.

dimanche 3 juin 2007

Entre l'�glise et la synagogue

Bapt�me ce matin � Saint-Antoine des Quinze-Vingt de la petite Alicia, auquel la famille franco-italienne, qui semble appr�cier la bella musica, m'a demand� de participer par ma musique. Sit�t fini, juste le temps d'avaler un repas express, en songeant aux agapes dont la France enti�re se gave en ce dimanche midi de la f�te des m�res, et en route... pour la synagogue et la c�l�bration d'un mariage ashk�naze.

Les Ave Maria ont donc c�d� la place aux 7 kiddouch et � Siman Tov, et je joue mon r�le de musicienne du culte toujours avec le m�me s�rieux. Est-ce que le rabbin sait que je ne suis pas Juive? Peut-�tre pas. Peut-�tre que si. Qu'importe : je pr�f�re chercher ce que nous avons en commun plut�t que ce qui nous s�pare, et puis apr�s tout, organiste c'est un m�tier comme un autre, qu'on l'exerce dans une �glise, une salle de concert, une synagogue ou un centre commercial! (comme au Japon...)

Apr�s le mariage, je demande au rabbin, qui correspond soi-dit en passant en tout point � l'image qu'un non-Juif peut se faire d'un rabbin -barbu, costaud, sympa, et muni d'une superbe voix qui sait ornementer avec sophistication les chants h�breux- je lui demande donc s'il est satisfait de moi et si c�t� musique tout s'est bien pass� (comme je demande toujours � tous mes interlocuteurs lorsque j'effectue un travail). Il m'a dit qu'il �tait ravi, et qu'il avait eu la sensation que par mon accompagnement j'avais r�ellement su le "porter", qu'il s'�tait senti libre dans son chant, suffisamment � l'aise pour se laisser aller vocalement, confiant que j'allais le suivre et le soutenir.

Je vous avoue que j'ai �t� �mue, qu'un grand gaillard dise � une petite puce comme moi que j'avais r�ussi � le "porter" - l'image fugace d'un pas de deux loufoque o� je le porte dans un entrechat digne de Fantasia m'effleure l'esprit - mais ce qui serait ridicule pris au pied de la lettre devient magique en musique.

Et c'est l� que la magie op�re, en fait : cette musique qui a su sourdre, qui survient � un moment pr�cis en d�fiant toutes les lois, celles des religions qui ne se parlent pas, ou enfin pas assez, celles de l'�ge, et celles du genre, et alors l'instant magique se produit. Et dans mes propres croyances personnelles, cet instant de musique accompagnera tout au long de leur nouvelle vie les mari�s d'aujourd'hui...

Mazel tov! (et merci � Bruno S. pour la photo!)

jeudi 5 avril 2007

Ubi caritas et amor

J'ai chant� aujourd'hui pour la messe du Jeudi Saint, dans notre petite chapelle de l'Agneau Vainqueur (o� je ferai d'ailleurs un concert le 29 avril, j'y reviendrai!), et o� je continue de participer aux c�l�brations comme chantre. Pendant cet office, j'ai entonn� avec l'assembl�e le chant "Ubi caritas et amor" : O� sont charit� et amour. Quelle belle langue � chanter que le latin! Et pourtant � de rares exceptions pr�s, on ne l'utilise gu�re que pour les chants sacr�s (est-ce un pl�onasme? toute musique, par d�finition, est pour moi sacr�e)

Dans les stages de chant que je dirige, j'insiste beaucoup sur la "sensation de la voix". Quel bonheur de chanter le mot "AMOR" ; chanter le mot "amour", en fran�ais, est tout � fait diff�rent. AMOR, mot mille fois chant� fin' par les trobadors, mille fois pr�sent dans les tangos comme dans les op�ras, amor se chante sur tous les tons. La pl�nitude du chant gr�gorien de cette m�lodie (ne dit-on pas "cantus plenus", chant "plein"... et plain-chant) associ�e � la sensation des voyelles et la saveur des consonnes du mot "AMOR" qui remplit l'appareil vocal et le corps tout entier m'ont caus� aujourd'hui beaucop de bonheur. Et � merveille, l'assembl�e avec qui je chantais a partag�, je crois, cette pl�nitude amoureuse accomplie par la musique. Si chanter c'est prier deux fois, c'est jouir combien de fois, d'apr�s vous? (Grincheux passez votre chemin! j'assume mes verbes, et � ce sujet j'�pouse la mystique �rotique de la Grande Tradition! Sainte Th�r�se d'Avila, Saint Jean de la Croix, ora pro ejus!)

Ubi caritas (gr�gorien) : partition et fichier midi - �couter un MP3

mercredi 27 décembre 2006

Hommage aux passeurs de musique: Diogène et Jean-Baptiste LeBlanc, chantres

La généalogie est un sport national au Québec. Je profite de la période de Noël, temps où chantres et organistes travaillent beaucoup, pour rendre hommage à mon grand-père et mon arrière-grand-père Diogène et Jean-Baptiste Le Blanc.

J'écris parfois dans les notes biographiques des programmes de mes concerts, que je suis "la 5e génération de musiciens d'église dans ma famille". C'est faux! Je viens de découvrir que je suis au moins la 7e génération!

Mais revenons à mon grand-père Diogène, que je n'ai malheureusement pas connu. Père de 15 enfants, il exerçait le noble métier de "laboureur", comme on disait autrefois, à Saint-François de Pabos en Gaspésie au Québec. Je dis bien "noble métier", pour trancher avec les clichés de bouseux et de péquenots que cela peut encore évoquer pour certains de nos jours, car être laboureur, au Québec à cette époque, c'était être un homme libre. Tous les matins, beau temps, mauvais temps, pluie ou neige, même à 30 en dessous de zéro, mon grand-père attelait la jument de trait et allait chanter la messe en grégorien à la paroisse Sainte-Adélaïde de Pabos, au bord de la Baie des Chaleurs. Sa terre était "dans le rang" (l'organisation des terres labourées étant encore imprégnée de régime seigneurial), et le chemin qu'il empruntait avec sa jument pour aller à l'église porte aujourd'hui son nom.

Tous les soirs après souper, ma mère me raconte qu'il se mettait à l'harmonium avec son Paroissien Romain, et qu'il répétait sa messe du lendemain. On dit qu'il avait une très belle voix. C'est en tout cas l'image qu'en garde ma mère, chez qui toutes ces mélodies ont laissé une empreinte profonde. Si bien que lorsque j'étais petite, pour m'endormir ou pour me distraire, que me chantait ma mère? Ce qu'elle avait entendu chanter par ses propres parents : du chant grégorien!

Rares sont les gens de ma génération qui ont eu la chance de recevoir, j'oserais dire par filiation, le "virus" du chant grégorien! Certes en grandissant j'ai considérablement approfondi ma connaissance de cette musique aussi vaste que la mer qui frappe la falaise au pied de l'église Sainte-Adélaïde de Pabos, et travaillé les différents styles comme les différentes esthétiques de cette musique, et je ne chante certainement pas le chant grégorien comme pouvait le faire mon grand-père. Mais chaque fois que j'entonne la Messe des Anges, j'ai une pensée pour le laboureur père de ses quinze enfants qui l'a transmise à ceux qui me l'ont transmise, moi qui la transmets à mon tour... (voir le billet "Stage de musique médiévale" dans la rubrique "Actualités")

Il faudra que je demande à ma mère comment se fait-il que mon grand-père se soit retrouvé chantre à la paroisse. Sans doute de la même façon que moi : à 12 ans on m'a assise sur un banc d'orgue, avec à peine quelques cours de piano dans les pattes, et il ne faisait de doute dans l'esprit de personne que j'allais jouer! Je n'ai jamais arrêté depuis: du haut de mes 31 ans, cela fera bientôt 20 ans que j'exerce comme musicienne du culte. D'abord pendant mes cinq ans de collège chez les religieuses (tous les matins! une sacrée école!), puis à la paroisse Saint-Charles Garnier à Montréal, puis à la Chapelle Notre-Dame du Bon-Secours, superbe sanctuaire sur le vieux-port de Montréal. En France j'ai exercé à Notre-Dame d'Alfortville et à la Chapelle de l'Agneau Vainqueur à Paris, en plus de nombreux offices chez nos amis protestants et même dans les synagogues! Diogène Le Blanc n'a fait, j'imagine, que reprendre le flambeau de Jean-Baptiste Le Blanc son père (ci-contre en photo avec son épouse mon arrière-grand-mère Marguerite Grenier), qui l'avait lui-même repris de son père...

En fait, aussi loin qu'on puisse remonter de mémoire d'homme, dans ma famille, on a toujours animé des messes. Et voilà que ma mêre me fait part, par-delà la mémoire humaine, à travers la mémoire écrite, qu'elle a lu (tiens il faudra que je lui demande où) que notre aïeul Benjamin Le Blanc (né en Acadie en 1740) animait des "messes blanches". Les messes blanches étaient des célébrations dominicales, des batêmes ou des funérailles, où faute de prêtre un laïc célébrait. (voir l'excellent article à ce sujet sur le blog de la famille Dugas - note : le Charles Dugas dont il est question est le beau-père de Benjamin LeBlanc) Ce n'est donc plus la 5e génération de musiciens d'église, mais bien la 7e... enfin, au moins. Jusqu'à ce qu'on trouve une mention d'archive qui confirmera que le père de Benjamin LeBlanc, et son grand-père avant lui...

Qu'ils soient tous bénis, en ce temps de Noël, ceux qui ont passé le flambeau qui est arrivé jusqu'à moi et qui brûle encore!

Lire aussi : "Il touche l'orgue depuis 40 ans", un portrait de mon oncle Claude LeBlanc, organiste à Sainte-Adélaïde de Pabos

mardi 26 décembre 2006

Nedeleg Laouenn

J'aimerais offrir � tous les lecteurs de mon carnet de bord deux m�lodies bretonnes de No�l. Pour d�baller votre cadeau (l'�couter, le mettre sur votre iPod, le graver, l'envoyer � vos amis, etc), faites un "clic droit" sur :
http://claudenadeau.free.fr/mp3/noel/bretons.mp3 (c'est ce que vous entendez actuellement avec la bo�te � musique situ�e dans la colonne de droite)

ou pour �couter avec Real Player:
http://claudenadeau.free.fr/mp3/noel/bretons.ra

Mais oui, je suis g�n�reuse de ma musique! Incroyable dans cette soci�t� de consommation et de droits de sacem... Je vous demande juste, si vous transmettez ce fichier � vos amis (ce � quoi je vous encourage vivement!) de ne pas enlever mon nom, et si possible d'�tablir un lien en retour vers mon site www.claudenadeau.net . Et si ces fichiers sonores vous donnent envie d'entendre le tout en musique vivante, en "live" comme on dit en anglo-saxon, eh bien sachez que c'est possible et que vous n'avez qu'� me contacter pour que je vienne jusqu'� vous partager la musique que je porte en moi comme on porte un enfant...

Le premier cantique est du pays de Gu�rande, Bel astre que j'adore, et le second du pays de Vannes, Pe trouz war an douar (l'une des plus belles parmi toutes les m�lodies bretonnes, � mon avis). Vous entendrez sur cet enregistrement-concert la hautbo�ste am�ricaine Allison Smith, que j'accompagne � l'orgue de ma petite chapelle � Paris.

C'est ma fa�on de vous souhaiter Nedeleg Laouen, et surtout d'essayer que, croyants ou pas, personne ne laisse sombrer dans l'oubli ce fabuleux r�pertoire breton.

Bonne �coute et bon No�l � tous!

PS pour les curieux : les paroles des cantiques

Pe trouz war an douar, pe gan a glevan-me ? Na kaer eo ar mouezhio� a zeu eus lein an ne�v ? Aeled, lavarit deomp perak ho kanaouenn ? Er bed petra nevez zo erru a laouen ?

Kanit ivez ganeomp, kanit, pobl an douar Ni deu da l�ret deoc'h un neventi hep par : Ur Mabig benniget, Roue Jeruzalem, A zo ganet 'vidoc'h e k�r a Vethleem

En un taol 'kreiz an noz eo ganet war ar maez En ur c'hozh kraou disto, 'kreiz an dristidigezh, C'hwi her c'havo eno, dister etre daou loen 'Vit tomma� e vempro� n'en deus 'met o alan

Eno e vo gwelet Mestr bras an holl er bed War un dornadig plouz en un nev astennet E� zeu da veza� paour 'vit hor pinvidikaat 'Vit distag ho kalon diouzh ar bed evit mat

Erru eo an termen eus ar profesio� O noz mil gwech e�rus a dorr hol liammo� ! Kanit gloar hag enor da Jezuz, da Vari, Deut eo Doue da zen, erru eo ar Mesi

traduction:

Quel bruit sur la terre, quel chant est-ce que j'entends ? Que les voix qui viennent des cieux sont belles ! Anges, dites-nous, pourquoi votre chanson ? Qu'est-il arriv� de neuf dans le monde ?

"Chantez donc avec nous, chantez peuples de la terre Nous vous annon�ons une grande nouvelle: un petit enfant b�ni, Roi de J�rusalem est n� pour vous dans la ville de Bethl�em.

Il est n� au milieu de la nuit dans la campagne Dans une vieille cr�che, au milieu de toute tristesse Vous le trouverez l�-bas, entre deux b�tes il n'a que leur haleine pour r�chauffer ses membres

L� vous verrez le ma�tre de l'univers sur un peu de paille dans une mangeoire allong� il est venu pauvre nous apporter la plus grande richesse pour d�livrer nos coeurs pour de bon

Les proph�ties sont r�alis�es O nuit mille fois heureuse qui vient briser nos cha�nes ! Chantez gloire et honneur � J�sus, � Marie : Dieu s'est fait homme, le Messie est arriv�

No�l gu�randais:

Bel astre que j'adore, Soleil qui luit pour moi, C'est toi seul que j'implore, Je veux n'aimer que toi. C'est ma plus ch�re envie, Seigneur, en ce beau jour, O� je ne dois la vie Qu'� ton immense amour.

Du fond de cette cr�che, J'entends, rempli de foi, Ta voix qui ne me pr�che Que cette douce loi. Divine et pure flamme, Descends du haut des cieux, Remplis, remplis mon �me, Oh ! viens combler mes voeux !

Plaisir, honneurs, richesse, Longtemps, m'ont trop charm� ; Je veux t'aimer sans cesse, Toi qui m'as tant aim�. De mon long esclavage Je suis donc rachet� ! � toi seul tout hommage, Mon coeur, ma libert� !

Seigneur, que la m�moire De tes divins bienfaits, Le z�le de ta gloire En moi vive � jamais ! Je veux toujours te suivre, Je n'ai plus qu'un d�sir, Pour toi seul, je veux vivre, Pour toi, je veux mourir.

Et vous, choeurs ang�liques, Qui du Seigneur naissant Chantez dans vos cantiques L'heureux av�nement, Venez pour moi, saints anges, Redire au doux Sauveur Vos hymnes de louange, Les chants de mon bonheur !

mardi 19 septembre 2006

Et lux perpetua

Longue journée aujourd'hui : j'ai chanté à Arnaville, du côté de Metz, à la cérémonie de funérailles d'une dame qui avait exprimé le désir d'avoir du chant grégorien à cette occasion.

Bien sûr jouer ou chanter pour des baptêmes ou des mariages semblerait plus gai. Toutefois, j'aime beaucoup chanter pour des convois, et j'ai la conviction que ma musique, tel Charron, contribue par sa spiritualité à "porter" la personne vers l'autre rive...

Il y a donc une sorte de relation presque intime à être l'outil de ce passage pour des gens que la plupart du temps je ne connais pas, et à qui je prête ma voix au moment d'avancer, nu, vers la lumière. Je ne sais pas comment décrire ce sentiment, mais en tout cas j'ai vraiment l'impression que ma musique, et le recueillement qu'elle impose aussi à ceux qui restent, sort de moi de façon transcendante : ma voix ne m'appartient pas, elle est l'outil, mon corps qui chante est le filtre, ou plutôt le catalyseur, et la Musique survient.

Retour en TGV vers 21h, ouf, la journée a été longue. A toutes les personnes qui trouveront ce document utile, voici le feuillet de participation qui reprend les partitions de la messe des morts en grégorien: www.claudenadeau.net/doc/funerailles_gregorien.doc