Claude Nadeau, musique classique - clavecin, orgue... musique baroque

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mercredi 18 novembre 2009

Le Serpent, un instrument qu'on n'entend pas souvent...

article paru dans Le Télégramme d'hier :

"Le Conservatoire de musique de Vannes accueille un jeune artiste, Volny Hostiou, spécialiste du "serpent", ancêtre du tuba, de la famille des cornets, pour une semaine consacrée à la musique ancienne. Jeune musicien de 28 ans, né à Quimper, spécialiste du tuba, Volny Hostiou se consacre aujourd'hui à cet instrument moins connu, apparu en France à la fin du XVIe siècle. Il enseigne le tuba et dirige les ensembles de cuivres du Conservatoire de Rouen. Quasiment abandonné dès le milieu du XIXe siècle, le serpent a été redécouvert il y a une vingtaine d'années et réintroduit en musique ancienne par une poignée de musiciens. Proche du cornet à bouquin, il était l'instrument privilégié d'accompagnement de la voix dans la musique d'église, puis dans les orchestres militaires et symphoniques.

Un concert et deux auditions

Premier rendez-vous de cette semaine spéciale, ce soir, à l'auditorium des Carmes, pour un concert-conférence autour de la "Musique ancienne", avec Claude Nadeau, claveciniste concertiste, en résidence depuis quelques mois à Vannes, organiste également, et Volny Hostiou. Deux autres temps forts sont programmés durant cette semaine à l'auditorium des Carmes: jeudi 19 novembre, à 18h30, audition cuivres; et vendredi 20, à 18h30, audition cordes et voix. Pratique Concert-conférence, mardi 17 novembre, à 20h, à l'auditorium des Carmes, place Maurice-Marchais. Entrée libre pour les trois rendez-vous."

J'ajouterai que franchement c'est une superbe expérience, car le serpent est un instrument que l'on n'entend pratiquement jamais... D'ailleurs avant de jouer avec Volny, même moi je n'avais jamais entendu un serpent autrement que sur disque. C'est un bonheur de jouer avec Volny Hostiou, véritable virtuose passionné par son instrument. Le concert d'hier a été superbe... rendez-vous jeudi et vendredi! Et comme toujours... bientôt les vidéos du concert! ;-)

Auditorium des Carmes. Le serpent à l'honneur
23 novembre 2009 - Le Télégramme

L'auditorium des Carmes accueillait, mardi soir, pour son second concert, un bien curieux serpent. Rencontre avec un instrument atypique.

Un serpent. Outre l'animal à la si mauvaise réputation, qu'est-ce que c'est? "Notre volonté ce soir, expliquait Volny Hostiou, est de vous faire découvrir cet instrument et ses possibilités". Il s'agit donc d'un instrument de musique... Encore que! Le serpent a longtemps été considéré comme... une voix: au XVIIe siècle du moins, le joueur de serpent se trouvait avec les chanteurs, pas avec les instrumentistes. Cet ancêtre du tuba était employé alors essentiellement dans les églises. On a ainsi joué du serpent à la cathédrale de Vannes en 1685.

Joué par cinq musiciens en France

Aux côtés de Claude Nadeau, (clavecin et orgue), le jeune instrumentiste-chercheur a expliqué au public attentif, l'usage du serpent, son histoire, tout en interprétant quelques airs de la période baroque. A l'issue du concert, une partie du public a tenu à échanger avec Volny Hostiou et à voir de près cet instrument rare. A ce jour, il en existe une centaine et seuls cinq musiciens en jouent de façon professionnelle.

mardi 9 octobre 2007

Éloge des clavecins mûrs

J'ai eu l'extrême privilège aujourd'hui de jouer un authentique clavecin d'époque. C'est la première fois que j'entre en contact direct et intime avec un instrument du XVIIIe siècle. Sa restauration est presque complétée, et il est jouable à nouveau depuis une semaine à peine.

Les photos sont mauvaises, je les ai prises avec mon téléphone portable...

Qu'est-ce que ça fait de jouer un clavecin ancien? D'abord c'est une grande émotion, car la sensation physique sous les doigts n'est pas du tout la même : les plectres en plume de corbeau, taillés un à un dans une partie spécifique d'une vraie plume (et toutes ne sont pas bonnes pour cet usage), donnent une impression étonnante, et un son croustillant, "comme des biscuits" pour reprendre l'expression de l'artisan qui a taillé les plectres et qui m'expliquait le tout. Il m'a fallu une bonne heure pour m'habituer à cette sensation de contact "biologique" avec la corde (le plectre est la languette -généralement en plastique- qui pince la corde du clavecin, comme le médiator d'une guitare).

Et puis le son n'est pas du tout le même, c'est un peu comme si l'on comparait un bon Côtes-du-Rhône récent à un vieux Bourgogne : il y a un velouté, un arrondi, une patine, une profondeur que seul le temps a pu laisser. Ce clavecin qu'on m'a laissée jouer pendant plus de trois heures (!) a un son très perlé, assez proche finalement du virginal ou du muselaar, et des harmoniques dans lesquelles on entend beaucoup de fondamentale. Pour dire les choses autrement, il n'a pas de puissance sonore particulière, mais la note elle-même a une très longue résonance, avec une brillance nacrée dans les aigus et des basses très profondes. Quand on déroule les notes, on a l'impression d'entendre une rivière de perles... C'est en outre la première fois que je vois un clavecin qui descende jusqu'au mi grave! (d'habitude le maximum c'est fa)

Il m'a fallu un bon moment avant de m'habituer à cet instrument, si loin de mes repères habituels. J'ai eu beaucoup de chance de pouvoir le jouer aussi longtemps : il n'est pas encore officiellement inauguré, et après son concert de "re-naissance", il entrera dans un musée. Dans la pièce à hygrométrie et à température contrôlées où il était, j'ai dû mettre mon châle pour ne pas frissonner. Mais était-ce seulement dû à la température?...

Depuis 1776, combien de clavecinistes se sont succédés sur cet instrument? Il a dû en entendre, des histoires. Les beaux instruments anciens me font rêver pour cela aussi. Mozart était vivant lorsque ce clavecin a été construit, il était même en France. Ce clavecin était-il un instrument destiné au continuo, pour la musique de chambre ou d'orchestre, ou pour du répertoire de soliste? S'agissait-il d'un instrument "basique" ou d'un clavecin haut de gamme, pour l'époque? Toute son histoire reste à réécrire.

Certes il est commode de jouer sur des clavecins flambant neufs, en parfait état de marche : pas une note qui accroche, un toucher égal, un accord qui tient, un jeu facile... Un instrument ancien a des limites, il a des blessures, il a des fragilités. Il faut en prendre soin. Il a sa propre histoire. Et comme pour les êtres humains, c'est précisément cela qui le rend émouvant.

Je dis souvent que j'aime les limites de mes instruments, d'une part parce qu'ils rendent les instruments plus "humains" en les rapprochant de nos propres limites, mais aussi parce que les limites de nos instruments nous apprennent comment jouer : si telle ou telle chose n'est pas possible sur un clavecin du XVIIIe siècle, il y a toutes les chances qu'au XVIIIe siècle on ne jouait tout simplement pas comme ça.

Quand on a la chance de jouer sur des clavecins magnifiques, ce sont eux qui nous apprennent à jouer.

lundi 24 septembre 2007

Le Reine-Claude

Je fais beaucoup de clavecin actuellement. J'y reviens comme on revient toujours à son premier amour, et parfois il nous faut plusieurs heures pour nous réhabituer l'un à l'autre. Parfois le "Reine-Claude" ne sonne pas, comme s'il m'en voulait de l'avoir délaissé pendant plusieurs jours il me prive de ses meilleurs fruits, et il me faut le jouer longtemps, patiemment, doucement, pour qu'il daigne me prodiguer, comme un immense cadeau, ses châtoyantes sonorités sous mes caresses.

Le "Reine-Claude"? Il a déjà sa légende, car les plus beaux opus de Marc Ducornet ont un nom, comme les Stradivarius. Ce nom doit à la fois aux caractéristiques physiques de l'instrument et à la fois au claveciniste qui l'a inauguré ou qui le possède (comme on possède une femme - moi par exemple je possède le Reine-Claude, vraiment). Ainsi il y a, dans la galaxie des plus beaux Ducornet, le "Verlaine", inauguré par Blandine Verlet ; il y a aussi "Pinnocchio", le grand amour de ma vie (que je finirai bien par acquérir, bon Dieu! mais il vaut son pesant d'or...), inauguré par Trevor Pinnock, et quelques autres encore qui méritent qu'on les appelle par leur nom.

Lorsque j'ai enfin pu m'acheter mon instrument de travail, celui qui jusqu'à présent s'appelait le "52 notes" a été baptisé. Il est né en 1977 non pas du travail des excellents artisans que compte aujourd'hui l'atelier, mais des mains même du maître. Il a été inauguré, m'apprend l'excellent Jean Bascou (également facteur de clavecins, à Simiane) à l'Abbaye de Fontevraud par un certain William Christie. Il a fait plusieurs fois le tour du monde, ayant été utilisé à leurs débuts par les Arts Florissants et le même Bill Christie. Il a pas mal bourlingué avec moi aussi pour mes concerts un peu partout, sa dernière grande sortie était pour deux concerts en Bretagne : à Carhaix et à l'auditorium des Carmes à Vannes. Heureusement, il n'est pas très lourd et se déplace relativement facilement... car, eh oui, c'est moi qui le porte... Même si je dis souvent qu'on reconnaît mes vrais amis au fait qu'ils aient déjà porté le clavecin! Le portage du clavecin est une épreuve initiatique...

Pourquoi lorsque je l'ai acquis l'avoir baptisé le "Reine-Claude"? En obéissant aux règles des noms des clavecins Ducornet : d'abord la caractéristique physique de l'instrument, sa couleur qui rappelle celle de la prune de ce nom, son style qui le rend particulièrement propre à la musique de la Renaissance (la reine Claude était l'épouse de François 1er). Mais aussi à cause du prénom de sa propriétaire (et de ses allures royales, confieront ceux qui la connaissent), et parce que la reine Claude était la fille d'Anne de Bretagne.

Actuellement sur le pupitre, je travaille justement la musique de compositeurs bretons du XVIIIe siècle, la Fantaisie chromatique de Bach (quelle musique psychédélique!), le concerto pour clavecin en sol mineur toujours de Bach, des tangos de Piazzola et Take Five de Dave Brubeck. J'ai plein de projets, si vous saviez, mais pour le moment je suis encore sous le sceau du secret. De grandes choses se préparent! Ah si, j'allais oublier que j'improvise tous les jours sur un thème, comme un mantra ou une prière, et que tout cela se cristallisera sûrement bientôt en "paraphrase", comme ma "paraphrase sur le cantique Ar Baradoz" que certains d'entre vous connaissent déjà : ce thème que je peins quotidiennement et amoureusement au clavecin, c'est la gwerz bretonne "An hini a garan". Breizh Touch oblige!

lundi 13 août 2007

Musique renaissance aux Nocturnes de Ferrières en Gâtinais (45)

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Très belle fête ce week-end aux 25e "Nocturnes" de Ferrières en Gâtinais, une ville que je connais bien puisque j'ai déjà eu le plaisir de diriger le choeur Chantecléry de Ferrières dans l'oratorio "Le Messie" de Handel, pour quatre concerts en 2003 dont l'un à la superbe Abbatiale de Ferrières.

Mises en scène cette année encore par l'incontournable Jean-Claude Beaudouin, les Nocturnes nous ont permis de faire entendre un répertoire de musique renaissance avec des danseries tirées essentiellement de l'Orchésographie de Thoinot Arbeau.

Ce fut le baptême du feu pour un nouveau collaborateur, le percussionniste Jean-Baptiste Leclère, que vous voyez tout sourire sur les photos dans son beau costume de musicien de cour! C'est toujours un grand bonheur de rencontrer des nouveaux musiciens, surtout quand le courant passe ; lorsqu'un de vos collaborateurs a particulièrement du talent, cela vous pousse à être encore meilleur vous-même...

Ancien élève de Michel Gastaud, avec qui j'ai fait en décembre et en janvier dernier deux concerts clavecin et percussion à l'Opéra National de Paris (et avec qui je l'espère j'en ferai de nombreux autres dans l'avenir...!), Jean-Baptiste Leclère vient tout juste d'entrer à son tour à l'Opéra comme percussionniste. Bravo à lui et bonne chance dans ce nouveau poste! Félicitations également à Michel Gastaud qui vient d'être nommé professeur de percussion au Conservatoire de Saint-Maur : vive les amis et buvons à leur succès! (sacrenom!)